La flambée des prix de l’énergie en Europe en quatre graphiques
Mark Lacey, Responsable actions matières premières et transition énergétique et Alexander Monk, Analyste matières premières
L’envolée des prix du gaz et de l’électricité devrait perdurer cet hiver et souligne la nécessité d’investir davantage dans les technologies de la transition énergétique.
La hausse des prix du gaz et de l’électricité a fait les gros titres ces dernières semaines. L’Europe semble être au cœur de la tourmente, même si elle n’est certainement pas la seule à connaître de fortes hausses de prix. La Chine souffre également de pénuries d’énergie et rationne l’électricité dans certaines provinces en conséquence.
Nombre des facteurs d’offre et de demande qui expliquent cette évolution sont également de nature mondiale. Toutefois, l’Europe présente des spécificités qui pourraient contribuer à maintenir les prix à des niveaux élevés et il n’existe pas de solution facile pour faire baisser rapidement les prix.
Flambée des prix de l’énergie
Tout d’abord, comme le montre le graphique ci-dessous, les prix de l’énergie ont fortement grimpé en Europe ces dernières semaines. La majeure partie de cette hausse est liée aux pénuries de gaz naturel.
Cette pénurie de gaz coïncide actuellement avec une hausse de la demande. La récente fermeture d’installations au charbon et les conditions météorologiques défavorables ont un impact sur d’autres sources de production d’électricité. Le graphique ci-dessous montre que la vitesse du vent au Royaume-Uni a été bien inférieure à l’habitude pendant une grande partie de l’été et en septembre, ce qui a diminué la production d’électricité éolienne
Pas de solution miracle
Cela prendra toutefois du temps et il n’y a pas de solution rapide pour résoudre la pénurie de gaz dans l’immédiat. Le gisement de gaz de Groningen aux Pays-Bas, autrefois le premier producteur de gaz européen, a considérablement réduit sa production au cours de la dernière décennie en raison du risque de tremblement de terre lié au forage.
L’Europe est donc très dépendante de la Russie pour l’approvisionnement en gaz, mais les réserves de ce pays ont été épuisées comme celles dans le reste du monde. Les volumes continuent de se redresser après un incendie à l’usine de Novy Urengoy en août et la Russie attend toujours que l’Europe approuve le gazoduc Nordstream 2. Il nous semble peu probable que les livraisons de gaz via Nordstream 2 atteignent le marché européen avant la fin de l’année.
De plus, l’énergie éolienne ne parviendra probablement pas immédiatement à pallier la pénurie et à faire baisser les prix globaux de l’électricité. Comme le montre le graphique ci-dessous, l’éolien couvre une part importante de la demande européenne en électricité au quatrième trimestre, mais il pourrait de nouveau y avoir un déficit au premier trimestre.
Quelles sont les implications pour les investisseurs ?
À court terme, la hausse des prix du gaz est clairement favorable aux sociétés énergétiques exposées au gaz, qui bénéficieront de l’augmentation des flux de trésorerie au cours des prochains trimestres.
Il faut toutefois faire preuve de prudence, car il n’y a aucune garantie que les clients accepteront de payer des prix toujours plus élevés. Si l’offre ne peut pas suivre, la demande pourrait baisser. Au Royaume-Uni, nous avons déjà constaté que la hausse des prix du gaz a entraîné un arrêt de la production de certaines sociétés d’engrais, ce qui a eu un impact sur le secteur alimentaire.
La flambée du prix du gaz ayant également fait grimper les prix de l’électricité, on commence à observer une hausse des prix des accords d’achat d’électricité (PPA) aux États-Unis et en Europe. Les PPA sont des accords de fourniture d’électricité à long terme entre les producteurs d’électricité et un client. Cette répercussion est bénéfique pour les développeurs de nouveaux projets d’électricité qui sont actuellement en mesure de compenser la hausse des coûts des équipements en concluant des PPA à des prix plus élevés.
À plus long terme, les tensions sur le marché de l’électricité devraient être favorables en termes d’accélération des investissements dans la transition énergétique. Il est évident que la production d’énergie renouvelable et le stockage doivent augmenter.
Toutefois, globalement, ces hausses des prix de l’énergie viennent se greffer sur un environnement qui subit déjà des poches d’inflation et des perturbations des chaînes d’approvisionnement. Les entreprises et les consommateurs finiront par supporter l’essentiel de la hausse des prix, ce qui devrait avoir un impact plus large sur l’économie.
Les investisseurs devront faire preuve de prudence, non seulement dans les secteurs de l’énergie et de la transition énergétique, mais aussi sur le marché actions dans son ensemble.