Une crise alimentaire mondiale : Recréer de la confiance au niveau des marchés 
Pour aider à endiguer cette crise, Olivier De Schutter pointe aussi l’impact de la spéculation. « A moyen terme, ce qu’il faut, c’est recréer de la confiance dans les marchés. Une des raisons qui explique cette hausse des prix tellement extraordinaire depuis le mois de février, c’est que les opérateurs sur ces marchés, les tradeurs de céréales en particulier, spéculent à la hausse. Ils parient sur le fait que les prix vont continuer à monter. Et donc ces opérateurs stockent des réserves dans l’espoir de les écouler en période de prix haut. Ils anticipent donc le risque de pénurie à l’avenir. C’est ça la spéculation sur le marché physique des céréales. Il faut donc recréer de la confiance en informant clairement les gouvernements sur niveau des réserves et sur la qualité des récoltes. »
« Malheureusement, la transparence sur ce marché n’est pas complète. Depuis 2011, un système a été mis en place, il s’appelle AMIS (ndlr : Agriculture Market Information System/Système d’information sur les marchés agricoles). Ce système est censé fournir aux gouvernements et aux traders privés, en temps réel, des informations sur le niveau des réserves et la qualité de récoltes. Mais ce système n’inclut pas des informations venant des grands traders privés comme Cargill, Archer Daniels Midland ou le Groupe Louis Dreyfus. Ces grands groupes qui détiennent l’essentiel des stocks de céréales au niveau mondial ne contribuent pas à cette information. Et donc les marchés fonctionnent dans une certaine opacité. Cela favorise la spéculation. Cela favorise des réactions de panique dans le chef des opérateurs sur le marché qui ne savent pas à quel niveau de stock ils vont faire face dans les mois qui viennent. Et donc, la spéculation sur les prix est très tentante pour ces traders. Il faut donc améliorer la transparence sur ces stocks. C’est une mesure extrêmement importante à prendre aujourd’hui.